Sélection Grand Prix des Lectrices ELLE 2020 – jury de mars.
Au fin fond des Appalaches, les hommes et la nature sont étroitement liés. Certains en tirent profit, d’autres tentent de la préserver. De cette dernière catégorie, Rice est employé par des hippies fortunés comme garde forestier d’une réserve. Rice fuit aussi d’anciens démons, et la réserve lui permet de se cacher, de faire profil bas et peut être aussi de donner un nouveau sens à sa vie. La découverte d’une carcasse d’ours mutilé réveille certaines aptitudes chez lui et il va chercher à comprendre comment cela a bien pu arriver. Pour cela, Rice doit alors sortir de sa solitude rassurante et se confronter aux gens du coin souvent rustres ou distants. Reste la contemplation pour se vider la tête et retrouver un souffle salvateur. « Il roula sur le dos, leva les yeux vers les sombres et denses entrelacs de sapins-cigües penchés au-dessus du cours d’eau, puis, beaucoup plus haut, les feuilles vertes et dorées des peupliers qui frottaient contre le toit bleu du ciel. »
L’écriture de James A. McLaughin est un délice. Les arbres et les animaux sont sur un piedestal, la nature décrite tout en beauté, en sensations, en aspérités. Rice n’est pas irréprochable mais voué à une mission noble dont on pourrait largement s’inspirer. Nul n’est parfait mais il est sans doute toujours possible de faire mieux, être respectueux, protéger la nature. Le récit est intense dans ces mots et à la fois très (trop) lent dans son déroulement. On se perd parfois, on décroche un peu goûtant à l’oisiveté. Puis le récit reprend de la vigueur et nous de l’attention. Une expérience troublante. Une sorte d’initiation, de recherche d’harmonie, de retour à la terre. Un livre qui ne laisse pas indifférent.
Dans la gueule de l’ours de James A. Mclaughlin, Editions Rue de l’échiquier, 448 pages.