Sélection Grand Prix des Lectrices ELLE 2020 – jury de mars.
C’est l’histoire de la rencontre entre un ours et une femme. Ou simplement l’histoire d’une femme qui survit, qui revit, qui vit le jour et la nuit, avec les ours et les esprits. Il y a définitivement un avant et un après, une quête mystique profonde. Nastassja est anthropologue, et passe plusieurs années avec les évènes, un peuple nomade de Sibérie. Elle partage le quotidien d’une famille qui vit dans la forêt en relation étroite avec la nature. « Cette nuit je m’endors en pensant aux montagnes toutes proches mais mon sommeil m’apporte les ours… Les visions de la nuits finissent toujours par passer, on les oublie c’est tout, ce qui ne veut pas dire qu’elles cessent d’exister ». Les rêves sont forts, une sorte de véhicule de l’âme, porteurs de messages et peut-être aussi de prédictions. Les ours sont là près d’elle, souvent dans sa tête jusqu’au jour de la rencontre. Un hasard, une fatalité, une rencontre poignante. Des dommages physiques, des égarements. « Les ours ne supportent pas de regarder dans les yeux des humains, parce qu’ils y voient le reflet de leur propre âme ». Tout est lié à la perception, l’indicible et un apprentissage de l’altérité.
Le côté romancé de l’histoire apporte une saveur toute particulière à ce récit. C’est troublant, enivrant, perturbant et souvent déroutant. On vole, on plane aussi dans cette transcendance. On a envie d’en savoir davantage, de voyager aussi, de bousculer notre vie. Même si on ne comprend pas toujours le sens, la direction, le mouvement de ses pensées, on reste tout de même happé. Une belle aventure au sens propre et figuré. Et finalement : « Vsio boude khorocho. Tout ira bien».
Croire aux fauves de Nastassja Martin, Editions Verticales, 152 pages.