Tout ce temps passé à pouponner, câliner, dorloter, consoler, panser les plaies.
Toute cette énergie investie, partagée, canalisée dans les apprentissages du quotidien et le souci du bien-être.
Toute cette joie, ce bonheur d’être ensemble.
Et les enfants grandissent. Ils ne nous appartiennent pas. Ils se détachent et s’en vont vivre leur vie.
C’est le jour du grand départ pour Théo. Le dernier petit déjeuner, le dernier jour partagé. Anne-Marie cherche le réconfort dans les gestes répétés du quotidien mais rien n’y fait. Tout la ramène à la réalité : aujourd’hui son dernier enfant quitte le nid. La journée commence avec indolence puis les évènements s’enchaînent sans doute trop rapidement pour elle : les cartons faits au dernier moment, le trajet jusqu’à son nouvel appartement, le déjeuner un peu pesant, le grand déballage et les au revoir gênés sur le trottoir. Elle cherche ici et là des repères, se montre attentionnée mais aussi maladroite avec lui. Sa nouvelle vie à lui commence ici, sa vie avec elle s’arrête là. Le désespoir est profond, la boule dans son ventre prend trop de place. Elle vacille.
Philippe Besson s’exprime ici à travers une mère avec une très grande sensibilité. Il dépeint avec finesse le désarroi qui remplit l’espace petit à petit, le sentiment de vacuité qui s’empare d’elle. On ressent la nécessité du contact physique, le besoin de partager des souvenirs communs, la distance déjà bien présente, la chute imminente. Loin d’une psychologie de bazar, Philippe Besson nous amène au coeur d’une situation certes ordinaire mais non moins bouleversante. Les émotions sont fortes, les mots / maux si touchants.
Le dernier enfant de Philippe Besson, Editions Julliard, 208 pages.